Budget primitif 2025. Entre ambitions affichées et réalité inquiétante!
- Michel CADET
- 9 avr.
- 7 min de lecture
Dernière mise à jour : 10 avr.

RESUME:
Bilan budgétaire à Périgueux : entre ambitions affichées et réalité inquiétante
Alors que le mandat municipal s’achemine vers sa fin, il est temps de dresser un vrai bilan de la gestion budgétaire à Périgueux. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que les chiffres ne sont pas à la hauteur des promesses.
Une situation financière sous tension
Annoncés à 31 millions d’euros, les investissements réalisés en 2024 n’atteignent finalement que 20 millions et 11 millions seront reportés en 2025. Pourtant, la Ville continue de s’endetter massivement : 21 M€ d’emprunts entre 2024 et 2025, un rythme bien plus soutenu qu’auparavant. Résultat : la dette grimpe en flèche et atteindra près de 45 M€ fin 2025 — un seuil qui rappelle dangereusement la crise de 2015, où une alerte financière avait été déclenchée.
Des choix de gestion discutables
Le mandat est marqué par une hausse spectaculaire de la masse salariale principalement liée aux reprises en régie et aux décisions nationales. Mais ce changement n’a pas été anticipé financièrement. Aucune provision pour des dettes connues (Indigo : 1,44 M€ ; EPF : 4,6 M€), et une opacité croissante sur les frais externes et les choix budgétaires.
Des projets coûteux, mal calibrés
Le stade de rugby à 18–20 M€ ? Très au-dessus des standards (Brive : 11 M€). La communication municipale ? 11 agents à temps plein, soit quatre fois plus que des villes similaires. Dans le même temps, l’équipe chargée de la propreté se limite à… deux agents. L’éclairage public ? Une taxe à 680 000 €, pour seulement 50 000 € de travaux prévus.
Autre point d’alerte : la voirie. Avec un budget de 2 M€, on est très loin des besoins du quotidien. Là encore, les choix budgétaires semblent déconnectés de la réalité de terrain.
Une gouvernance en question
Les difficultés ne se limitent pas aux chiffres. Les projets sont mal préparés (comme la piste d’athlétisme sans étude de sol), les coûts sont systématiquement sous-estimés, et la communication avec les élus est jugée opaque. Un exemple ? Une ligne budgétaire anodine de 208 000 € pour les réserves du MAAP cache en fait un projet évalué à 8 M€...
Une ville vraiment plus attractive ?
Finalement, une question s’impose : la ville est-elle aujourd’hui plus agréable à vivre, plus propre, plus sûre ? L’offre culturelle et sportive s’est-elle enrichie ? Les agents municipaux se sentent-ils plus valorisés ?
Malheureusement, à ces questions, le bilan semble dire non. Et les décisions budgétaires actuelles risquent fort de peser lourdement sur les générations futures.
« Du jamais vu de mémoire de périgourdin » … Belle annonce début 2024 mais seul le Compte Administratif reflète la réalité et la sincérité budgétaire notamment sur les investissements. De 31 M€ d’investissements prévus, nous sommes passés à 20 M€. Et c’est heureux pour nos finances. Cependant sur les années 2024 et 2025, nous souscrivons un emprunt total de près de 21 M€. Depuis Xavier Darcos, la moyenne annuelle des emprunts est de 3.3 M€. Vous, sous ce mandat, ce sera 5.1 M€/an. Vos emprunts d’aujourd’hui seront les dettes des périgourdins, demain.
2025 : des travaux réels à un peu plus de 8 M€ une fois soustraits les 1.2 M de rachat de l’EPF, les 3.2 M du Stade déjà fléchés depuis 4 ans, et 11 M€ de restes à réaliser. Pour être transparent, il existe, et c’est notable, des subventions (du reste à réaliser 2024 et celles attendues en 2025) pour 8 M€ si elles ont bien été toutes notifiées. Elles auraient d’ailleurs pu être produites en annexe. En effet au ROB, il y a seulement deux semaines, vous évoquiez des subventions « estimées » avec un chiffrage sensiblement moindre.
L’encours de la dette au 31 décembre 2024 était de 35 M€ et sera porté fin 2025 à quasiment 45 M€ si tous les emprunts sont réalisés à 100%. Pour mémoire, en 2015, une épargne nette réduite et 41 M€ de dette avaient déclenché la mise en réseau d’alerte de Périgueux au sein des communes en difficultés. Se pose donc un problème de soutenabilité et de cohérence des budgets présentés.
En 6 ans de mandat, le bilan financier, c’est 30% de dette supplémentaire. « Un peu comme si on allait tous les soirs au restaurant en faisant ensuite payer la facture à nos enfants ». Citation d'Edouard Philippe, qui parlait ainsi des finances de l’Etat mais qui aurait pu le dire pour celles de Périgueux

A l’image des deux derniers budgets, oui, ce mandat peut paraitre audacieux de prime abord et c’est ce que penseront vos thuriféraires. Dans la période post covid avec des taux d’emprunt très bas, c’était la bonne temporalité pour faire des investissements et lancer des projets. Dont acte. Vous en aurez fait pour plus de 75 M€ sur les 6 années de mandat. Ce sera, évidement votre grand axe de communication de cette dernière année et de la prochaine campagne électorale. Et vous aurez emprunté …beaucoup : 32 M€.
Était-ce une bonne réponse aux besoins réels et aux priorités des périgourdins ?
Les périgourdins voulaient-ils un stade de rugby rénové ? La réponse est oui mais pas à ce prix : entre 18 et 20 M€ ! Le succès populaire indéniable ne suffira pas à masquer des choix stratégiques et de gestion contestables. A Brive, une rénovation quasi identique aura couté 11 M€ !
Les périgourdins réclamaient-ils un staff pléthorique au pôle communication ? La réponse est d’évidence non. 11 agents ETP, là où, en comparaison, une autre collectivité, le Grand Périgueux, en a 1,5. Les études sur les municipalités montrent en moyenne, en France, un communiquant pour 10 000 habitants… Nous avons une équipe à Périgueux digne de villes comme Orléans, Rouen ou Nancy ! 4 fois plus que dans des villes de même strate et pour faire quoi ? Stimuler l’attractivité de la ville ou promouvoir l’action municipale auprès des électeurs, comme le prouvent les plaquettes luxueuses distribuées aux vœux ?
Les périgourdins veulent-ils une ville plus propre ? oui, bien sûr, mais la « brigade », dixit, proposée n’est pas à la hauteur de la situation … 2 agents de salubrité. Action d’évidence très insuffisante pour nettoyer efficacement nos rues.
Les périgourdins veulent-ils des rues éclairées et sécurisées la nuit et une baisse de la facture énergétique de la collectivité ? La réponse est oui. Ils le demandent tous les jours. Mais à quoi vont être utilisés les 680 000 € de la taxe annuelle sur l’électricité que nous percevons quand la ligne budgétaire des travaux électriques est annoncée à un dérisoire 50 000 €.
Les périgourdins souhaitent-ils une voirie et des trottoirs en meilleur état ? La réponse est oui. Mais 2 M€ ne suffiront pas quand un vrai plan pluriannuel sur plusieurs mandats devrait être priorisé mais qui coutera, nous le savons, 25 à 30 fois plus cher !
C’est un mandat qui hypothèque l’avenir car il est imprévoyant
Mandat imprévoyant par ses dépenses de fonctionnement insuffisamment maitrisées. Durant les six années de ce mandat, la masse salariale aura explosé passant de 22 à plus de 27 M€, 62% de notre budget. Se sont ajoutés 144 agents supplémentaires (en lien avec les reprises en Régie) et les conséquences salariales qui en découlent.
Mandat imprévoyant par ses emprunts trop lourds témoignant d’un véritable dérapage budgétaire
Mandat imprévoyant par ses dépenses oubliées et non provisionnées aujourd’hui (Indigo= 1,44 M€, EPF = 4.6 M€). Des dettes à rembourser qui ne figurent pas dans vos ratios avantageux.
C’est un mandat qui dégage une impression, au mieux d’imprudence au pire d’inconséquence.
Les délibérations successives traduisent :
Un problème de gouvernance et une gestion déplorable des ressources humaines. Avec un rapport organisationnel à 40 000 € qui laisse sur sa faim tant ses conclusions ont été édulcorées.
Des prévisions initiales de travaux largement sous-évaluées. Majorations systématiques des couts initiaux votés de 1,5 plus pour Taillefer, 2 fois plus pour le Sans Réserve, plus que doublé pour le Parc des sports et 2,5 plus pour l’Ecole A. Boissière...
Un montage financier trop idéologique pour cet équipement structurant qu’est le Stade, épuisant les fonds publics et n’intégrant pas de fonds privés ou de réels co-portages avec d’autres collectivités ;
La séduction trompeuse d’importantes subventions affichées à 80% et fortement réduites ensuite
Des projets mal « ficelés » car trop précipités à force d’être opportunistes. L’exemple criant restera définitivement celui de la piste d’athlétisme, implantée sans étude de sol préalable… dont nous devrons évoquer les problématiques pendant plusieurs années encore.
Une incapacité pour nous élus de mettre en œuvre de façon effective nos prérogatives décisionnelles par incomplétude, imprécision ou par le caractère volontairement partiel ou superficiel des informations transmises :
Glissé dans ce BP, une ligne budgétaire portant sur 208 000€ de frais d’études pour les réserves externalisées du MAAP… Un choix couteux qui nous engage pour le prochain mandat, sans le dire dans un projet global qui dépassera à termes les … 8 M€ mais que nous votons, comme pour le stade, par petites touches sensées être indolores… sans étudier, jamais, l’ensemble du dossier de manière concertée.
L'EXEMPLE DES RESERVES MUSEALES:
Un projet que l'équipe en place qualifiera pourtant de courageux et de visionnaire et qui commence à être évoqué dans ce BP. Pour mémoire, nous avons acquis pour 530 000 euros ce grand bâtiment industriel assez vétuste à Coulounieix-Chamiers pour en faire des Réserves externalisées, dans le but de rénover le MAAP réellement en souffrance.
L’idée initiale était bonne et pertinente mais ce choix s’avèrera catastrophique et très couteux. Outre le fait que le bâtiment Coopere ne valait initialement que 300 000 euros et que nous l’avons, par nos tergiversations, finalement payé 230 000 euros de plus, cette année, on nous demande de voter 208 000 euros de frais d’études, les premières selon nous d’une longue liste.
Au total on approchera probablement les 800 000 à 1 M€ d’études et un projet global de rénovation de ce bâtiment ancien, situé de plus sur une autre commune, avec un atterrissage global du projet à plus de 8 M€ TTC.
Le MAAP est condamné à attendre longtemps pour sa propre rénovation…
A ce rythme, on va finir pas regretter de ne pas avoir acheté la Banque de France pour 1.2 M€, bâtiment de centre-ville emblématique, proche, en bon état alors et sécurisé, plus propice à des réserves et des expositions temporaires. Une absence douloureuse d’anticipation qui nous coutera, finalement 3 à 4 fois plus cher.
Ce sont des réalisations de mandat forcément légitimes car vous avez été élus. Mais, in fine, vos choix sont contestables car trop ciblés et avec trop peu d’investissements intéressants l’ensemble de nos habitants, de nos contribuables, de notre tissu économique, de nos visiteurs.
Les vrais questions : vos projets auront-ils augmenté l’attractivité économique de la ville ? Périgueux est-elle devenue plus séduisante et plus agréable à vivre, plus propre et plus sécurisante ? L’offre commerciale, culturelle ou sportive est-elle plus élargie ou au contraire en souffrance ? Nos agents sont-ils plus heureux et plus épanouis ?
Nous craignons que les réponses à ces questions soient négatives et il ne s’agit pas, là, d’un « Périgueux bashing » comme me le rappellera certainement M. Delcros… mais de l’inquiétante absence, par votre équipe, de réponses cohérentes et pragmatiques à des préoccupations bien réelles du quotidien de l’ensemble de nos habitants.