En réponse à l’ouverture du tiers lieu dans le parc de la maison de retraite du CHG de Périgueux, largement développé dans la Dordogne Libre du jour (17 mars 2023) dont certains se félicitent; pour avoir beaucoup fréquenté l’EHPAD Parrot-Beaufort ces dernières années à titre familial, je ne suis pas certain que la création d’un tiers lieu à 150 000 euros soit la priorité de cette structure…
Cette EHPAD publique, essentielle, abrite de très nombreux résidents au travers de ses 5 structures. Elle se compose du pavillon F « Les félibres », moderne de part une construction récente (ouverture en 2012) avec 4 unités de 48 lits entièrement dédiées à l’accueil des personnes atteintes de maladies Alzheimer et apparentées, un SSR de 60 lits et les 4 pavillons Acacias, Bouleaux, Cèdres et Douglas (deux étages occupés sur 3) qui regroupent 251 patients. Ces derniers pavillons, mais surtout le D, sont dans un état de vétusté et parfois d’hygiène assez préoccupant. Les infrastructures sont vieillissantes, les ascenseurs souvent non fonctionnels et délabrés, ajoutant l’inconfort des odeurs à la crainte de rester bloquer entre deux étages.
Le personnel soignant y est épuisé physiquement et psychiquement avec de très nombreux arrêts de travail pour maladie, maladie professionnelle et burn out. Nous sommes, ici aussi, comme dans l’ensemble du centre hospitalier, dans un service public exsangue, sous équipé, maltraité avec de trop nombreux lits fermés et du personnel en sous-effectif.
Il y a peu d’EHPAD publiques sur notre territoire et l’arrivée massive de nouveaux habitants âgés en Périgord, souhaitant y passer leur retraite, fait renchérir les couts des hébergements les rendant souvent inaccessibles pour les habitants du terroir. Ces nouveaux ruraux, n‘ont pas participé à la richesse du Périgord dans leur vie active par leurs contributions, mais complexifient l’hébergement de nos ainés issus de nos villages. De nombreux groupes privés ont défrayés la chronique ces derniers mois et cette financiarisation de l’hébergement de nos seniors pose question. Il suffit de voir le nombre des constructions nouvelles de résidences pour personnes âgées sur notre territoire et sur la ville-centre (Place Faidherbe, rue Combe des Dames, Sainte Marthe, Trélissac). Les établissements publics à des prix un peu plus accessibles sont donc essentiels.
On peut se gargariser de mots creux (remettre le résident à sa place de citoyen, développer un nouvel espace qui s’affranchit des murs, redessiner le vivre ensemble, préfigurer l’EHPAD de demain, partager les connaissances et les compétences des résidents, valoriser la personne âgée dans sa globalité et ses capacités…). On peut imaginer faire des ateliers de philosophie, d’art floral, de graff, de socio esthétique… c’est tout à l’honneur des animateurs et nous ne pouvons que les remercier de leur investissement au quotidien.
Cependant la réalité est toute autre.
Les résidents vieillissent et sont de plus en plus dépendants, de moins en moins en capacité d’avoir une vie sociale et d'être dans l'échange. Le manque criant de personnel certains jours et particulièrement le dimanche, le maintien alité de personnes que l’on n’a pas le temps de lever, la douche une fois par semaine, le repas qui refroidit inexorablement sur la table roulante hors de portée car deux soignants pour un étage c’est insuffisant, le verre d’eau trop lourd et la carafe trop distante… les effluves des patients les plus incontinents, le surnombre de résidents en fauteuil dans une salle commune bondée avec comme seule animation une télévision allumée sur un programme de dessin animé japonais …
C’est le quotidien non romancé de trop nombreuses maisons de retraite. C’est le quotidien des pensionnaires, des familles et des agents épuisés, trop peu nombreux dans tous ces pavillons et c’est particulièrement vrai aux Félibres qui malgré ses équipements neufs est en état de tension extrême au niveau des personnels.
Je demande aux élus qui ont défilé dans le jardin partagé (Pour mémoire, il existait déjà et après une phase d’intérêt initial, il retombera assez vite en friche), qui ont applaudi à cette réalisation, certainement utile, mais vraiment non prioritaire, de venir de manière impromptue, non organisée, individuelle, au 2ème ou 3ème étage du pavillon D et de se faire leur propre idée.
N’oubliez pas de visiter les toilettes d’une chambre également où les WC doivent dater de trois décennies. En voilà une vraie priorité à financer pour 150 000 euros : refaire les toilettes !
Le constat est amer. On me rétorquera que ce n’est pas le même budget. Qu’il y avait une opportunité de Fonds de France Relance et de Fonds Européens destinés aux tiers-lieu en EHPAD… mais dans ce cas, sachons rester discrets sur ce type de réalisation tant la priorité est ailleurs.
Plaquette de présentation des travaux en 2012