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Fin de vie: modifier la loi actuelle?

Pour ceux que cela intéresse, car la problématique est angoissante, voici l'avis éclairé et récent de l'Académie Nationale de Médecine sur ce sujet qui sera d'actualité parlementaire à la rentrée mais qui ne fait pas l'unanimité, notamment chez les psychiatres.


Un avis exprime une prise de position officielle de l’Académie Nationale de médecine. L’Académie, dans sa séance du mardi 27 juin 2023, a adopté le texte de cet avis par 60 voix pour, 24 voix contre et 10 abstentions


Très intéressant document à lire dans son intégralité (annexe 1) car nous serons tous, personnellement ou dans notre entourage, confrontés à ce dilemme, celui d'abréger des souffrances intolérables d'une personne, en dehors du risque vital immédiat, dans le cadre de maladies incurables.


La clause de conscience des professionnels reste incontournable sur ce dossier complexe et délicat.



Tenant compte de la volonté du législateur de modifier le cadre actuel de la loi sur la fin de vie, l’Académie nationale de médecine tient à :


1. Souligner l’importance et l’intérêt des dispositions législatives en place portant sur la fin de vie à court terme, socle d’une avancée humaine, qui sont à conserver précieusement et à confirmer tant elles sont essentielles.

2. Alerter sur le décalage inacceptable entre les droits ouverts par ces textes législatifs en vigueur, et leur application hétérogène sur les territoires, en particulier par l’insuffisance de l’offre d’accès aux soins palliatifs.


3. Réaffirmer que l’accompagnement, l’écoute, l’attention portée à la personne en fin de vie et à ses proches doivent être assurés (quelle que soit la décision prise).


4. Affirmer qu’il est inhumain, lorsque le pronostic vital est engagé non à court mais à moyen terme, de ne pas répondre à la désespérance de personnes qui demandent les moyens d’abréger les souffrances qu’elles subissent du fait d’une maladie grave et incurable.


5. Répondre à ces situations de supplice non soulagé d’une vie sans espoir, en aménageant de manière encadrée le dispositif actuel par l’ouverture de droits nouveaux pour aider à mourir le moins mal possible, en acceptant à titre exceptionnel l’assistance au suicide, sous conditions impératives.

6. Souligner la difficulté mais aussi la nécessité de concilier les messages de prévention du suicide et les soins prodigués dans les suites d’une tentative de suicide, avec l’assistance au suicide.


7. Ecarter l’euthanasie au regard de sa forte portée morale et symbolique, mais aussi du fait que les professionnels et membres des associations de l’accompagnement en fin de vie s’y opposent et redoutent cette pratique.

8. Affirmer qu’une reconnaissance de l’assistance au suicide rend impérative la nécessité de mettre en place sur l’ensemble du territoire une offre en soins palliatifs correspondant aux besoins et accompagnée des moyens nécessaires.


9. Souligner que l’assistance au suicide ne saurait suffire à une fin de vie paisible et digne que seul peut apporter un accompagnement compétent et attentionné, respectueux de la demande des patients et de l’attente de leurs proches. D’où le prérequis impératif d’un accès aux soins palliatifs et de la formation initiale et continue obligatoire de l’ensemble des professionnels de santé afin de garantir un continuum entre les soins curatifs et palliatifs.

 

Huit recommandations formulées dans la perspective d’une loi

dans laquelle le législateur retiendrait une aide active à mourir

 

L’Académie nationale de médecine :


1– Appelle à maintenir tout en les aménageant les dispositions législatives en place, à mieux faire connaitre les droits acquis des personnes sur la fin de vie, et à développer prioritairement la formation obligatoire des professionnels de santé et l’offre de soins palliatifs pour tous et partout, avec les moyens nécessaires.


2– Se positionne et affirme avec fermeté la nécessité absolue de protéger les personnes les plus vulnérables dont la liberté de choix en fin de vie peut être questionnée en raison d’une capacité de discernement altérée.


3 – Demande une extrême vigilance si devait être retenue l’assistance au suicide, afin d’éviter toute dérive en mettant en place des conditions impératives et limitatives énoncées dans le présent avis et en évaluant régulièrement leur application stricte.


4– Exige notamment d’encadrer les prises de décision concernant l’assistance au suicide par une évaluation préalable réactive et répétée, rigoureuse, collégiale, multi professionnelle, suite à la demande de la personne en capacité de discernement et bénéficiant de soins palliatifs.


5- Appelle à exclure du champ de l’indication d’une assistance au suicide les troubles psychologiques, l’état dépressif, le grand âge avec troubles cognitifs avérés, les maladies et handicaps avec altération de la capacité de jugement.


6- Affirme l’immense attention qui doit être portée à la situation de mineurs en fin de vie, et dont les parents ne sauraient avoir à supporter une douloureuse prise de décision.


7– Rappelle la possibilité en cas de difficultés, d’incertitudes ou de conflit sur la décision à prendre d’avoir recours à une juridiction collégiale ou à un magistrat spécialisé.


8– Demande la reconnaissance dans la loi d’une clause de conscience pour les professionnels de santé opposés à une assistance au suicide.


9– Appelle à la vigilance sur l’application effective des dispositions nouvelles venant aménager les dispositions législatives en place.


Intéressante controverse soulevée par un collectif de médecins psychiatres ( cf en annexe 2 la tribune parue dans le Nouvel Observateur 07 juillet 2023)

Quelle serait la signification d’une loi qui établirait un protocole de gestion de nos morts ? Imaginer qu’un dispositif législatif répondra à toutes les situations humaines si plurielles et si complexes est un leurre et un piège. Si nous levons l’interdit de participer à la provocation de la mort, nous aurons certes la solution radicale aux rares cas difficiles, mais en contrepartie nous fabriquerons de toute pièce des dilemmes bien plus insurmontables comme chez nos voisins qui ont dépénalisé l’aide active à mourir ou l’euthanasie.
 

Annexes:


Texte intégral Académie de Médecine:

Tribune du Nouvel Observateur (07 juillet 2023):

 

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