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Important travail sur la navigabilité de l'Isle

De Savignac-les-Eglises à Razac-sur-l'Isle, le temps de la réappropriation

Après le temps des premiers usages, depuis le néolithique (échanges, pêche, invasions…), vint le temps de l’aménagement durant plusieurs siècles (chemins de halage, moulins, tanneries, forges, papeteries, filatures…), puis le temps de l’œuvre politique, notamment au XIXème (digues de lutte contre les crues, port, canalisation du trajet…) combiné avec celui de l’exploitation commerciale (moins de 90 ans au total sur notre rivière) puis le temps du délaissement (arrêt de la navigation depuis 80 ans, abandon des équipements, ensablement, implantation de microcentrales hydroélectriques, disparition de la servitude de franchissement et de continuité…).

Arrive aujourd’hui, le temps de la réappropriation et de l’identification de ce territoire naturel et nautique qui pourrait s’appeler, par toutes ses composantes, la « Via Vesunna ».

La rivière aménagée est un « anthroposystème » complexe qui s’inscrit dans une histoire très longue. La vallée de l’Isle a toujours été un corridor de déplacement, déjà à l’époque préhistorique, des populations animales puis humaines, des contreforts du Massif-Central jusqu’aux rives océanes, déplacements d’abord par voie terrestre (voie romaine devenue route impériale puis nationale) et fluviale, puis plus sophistiqués avec des voies d’eau artificielles, le chemin de fer et enfin l’autoroute.

Le bateau, instrument premier de l’espace nautique requiert pour sa circulation des équipements particuliers : le port qui l’accueille, les barrages qui maintiennent une hauteur d’eau suffisante, les pertuis, les écluses, les canaux qui lui offrent un passage. Ces éléments forment ensemble les principaux équipements liés à la navigation. La rivière est bien un espace de navigabilité mais cette fonction doit composer avec d’autres usages du cours d’eau, usages multiples, « molinologiques », hydroélectriques, sportifs, halieutiques, qui ont façonné un espace négocié, partagé, traversé, exploité.

L’Isle, au travers de son histoire et des traces laissées, offre encore de nos jours une grande lisibilité de ses fonctions permettant une vision multiple du paysage fluvial. Ces témoignages et marques forcent le regard pour peu que l’on s’y intéresse et appellent à la redécouverte des différents lits de la rivière, de la plaine alluviale et de son riche écosystème, des espaces associés propres à chacun de ses différents usagers. La méconnaissance de cette histoire serait source d’errements et de réalisations nocives potentiellement irréversibles.

Réinterrogé et enrichi des apports contemporains liés aux évolutions de l’usage des voies intérieures, le concept de « navigabilité des rivières » qui nous préoccupe aujourd’hui, se décline selon des points de vue renouvelés, portés par les acteurs contemporains du monde fluvial : aménageurs privés ou publics, chercheurs, responsables touristiques, services des patrimoines, associations environnementales, sportives, culturelles et gestionnaires de l’espace agricole et maraicher des berges, notamment avec l’arrivée de néo-ruraux. De Libourne à Périgueux, de multiples signaux indiquent que le temps de la rivière est revenu.

Le concept doit aussi s’ouvrir à des temporalités nouvelles dont la « flurbanisation » en est un exemple. Ce néologisme désigne le mouvement de regain d’intérêt consécutivement au retour physique des populations citadines vers les voies d’eau timidement amorcé dans les années 1970 et renouvelé de manière plus prégnante avec la crise sanitaire actuelle, en direction cette fois-ci des territoires ruraux.



Ici sur notre territoire, les élus depuis 30 ans, par touches successives, parfois très appuyées, comme lors de l’aménagement des premiers 15 kilomètres de voie verte, valorisé par un prix européen en 2007, puis au gré des travaux, ont apporté leur pierre à la réappropriation de l’Isle et de ses berges, mais sans en faire un projet à part entière. Nous sommes donc en retard comparativement à d’autres rivières ou fleuves déjà aménagés, en particulier dans leurs trajets intra-urbains. Le point positif de ce retard, avec notre regard du XXIème siècle, est celui d’être l’occasion de plus d’attention à ne pas dénaturer ce formidable outil de développement, d’en garder son authenticité et d’éviter les erreurs de la bétonisation à l’excès comme cela a pu être vu par ailleurs. Des organismes y veillent, entre autres : EPIDOR, le propriétaire et chef d’orchestre du DPF, les syndicats de rivière et le Conservatoire des Espaces Naturels, pour leur part, et bien d’autres structures associatives toujours vigilantes sur ces aménagements.


Aujourd’hui, il est une véritable nécessité que de porter une vision globalisée, volontariste, cohérente, concertée et surtout environnementale sur cet espace naturel qui traverse nos bourgs et nos villes. La « dorsale douce » de notre agglomération, dans toutes ces composantes, sera l’une des clés de notre attractivité des prochaines décennies. Nous serons jugés sur notre capacité d’aménagement raisonnable et cohérent, éco responsable tant pour les habitants que pour nos visiteurs. Ce document sera, avec l’aide des responsables de chacune des communes concernées, un authentique manifeste de pleine nature.

Nul n’imagine à cette heure, que l’entièreté de la rivière redeviendra navigable jusqu’à l’estuaire, du moins dans les prochaines décennies. Ce serait déraisonnable et dispendieux. L’animation fluviale n’est pas là, non plus, pour masquer la désertion des canaux dans leur vocation première : le transport de marchandises. Elle est le support d’une nouvelle économie tournée vers l’accueil et le séjour des touristes, mais surtout un lien favorisant le bien-être de ses habitants.


C’est le sens de la commande politique qui nous a été faite et nous livrons, ici, dans cette étude qui se veut une collecte des données et des propositions synthétiques pour chaque tronçon communal, celles qui nous ont semblé les plus pertinentes, à la lumière de nos échanges, de notre connaissance du milieu nautique, de l’histoire de la rivière et de celle du territoire. Ce diagnostic global « généraliste » ne saurait être celui des spécialistes de chacun des domaines étudiés car nous n’avons pas leurs compétences, mais ils nous ont, pour partie, aidé à l’établir.


réflexion et compte tenu de nos connaissances personnelles, nous nous sommes fixés des limites. Nous n’avons pas réalisé d’étude détaillée portant sur la propriété du parcellaire, ni sur la faisabilité financière de chacune des propositions et avons limité cette étude aux territoires des 13 communes du linéaire les plus proches de la rivière. Sur ce dernier point, il semblerait pertinent de poursuivre le travail sur l’ensemble des 43 communes de notre agglomération. Les investissements financiers évoqués, parfois importants, restent très raisonnables, à notre sens, en regard de la transformation durable de notre espace public et sont à la mesure d’un projet de territoire dont certaines propositions, les moins couteuses et les plus facilement finançables de manière transversale, pourraient se mettre en place, si nous le souhaitons, dès cette année.


Par ailleurs, nul doute que des éléments seront certainement absents de ce recueil, d’autres déjà engagés, certains incomplets voire erronés et ne manqueront pas d’être signalés pas nos élus attentifs et avertis. Ils viendront ainsi compléter la présente contribution.


Nous remercions chacun pour sa confiance lors de nos rencontres, son implication à l’élaboration de cette étude et pour l’intérêt suscité par notre travail. Ce furent des échanges enthousiasmants.


ectueusement,

Michel CADET Délégué à la Navigabilité de l’Isle

mars 2023


 
 
 
 
 
 



















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