Conseil Municipal du 26 novembre 2020 - DELIBERATION n° 10
Madame la Maire, mes Cher(e)s Collègues
Je souhaite profiter de cette proposition généreuse que nous soutenons à cent pour cent et qui est d’une absolue nécessité pour ces familles déjà impactées par la gestion difficile du cas de leur enfant tant sur le plan scolaire que médico-social ou sanitaire et, que vous m‘autorisiez, sur le thème du handicap psychologique et de l’intégration scolaire, à faire un léger hors sujet en m’appuyant sur cette délibération, pour attirer votre attention sur un besoin qui honorerait la commune de Périgueux s’il était satisfait, et cela, sans aucune polémique partisane, ce qui ne serait d’ailleurs pas à la hauteur du défi que nous avons à relever. Ce sera là, ma seule intervention de ce Conseil. Je vous demande cinq minutes de temps de parole.
Merci Madame la Maire.
En tant que professionnel de santé, je suis amené, avec d’autres, à soigner des enfants de 2-3 à 5 ans en grande difficulté qui nécessitent scolarisation et soins, en même temps. Ces enfants ont ce que l’on appelle un trouble du neurodéveloppement.
Ils représentent actuellement, selon certaines estimations, dix pour cent de l’effectif d’une classe standard, soit trois enfants en moyenne par classe avec troubles de l’apprentissage, troubles praxiques, troubles du langage. Imaginons l’enseignant qui peut être amené à gérer trois élèves de ce type, en même temps, au sein de sa classe : c’est plus de la moitié de son temps de travail… et une perturbation garantie pour tous.
Le parcours diagnostic de ces enfants « différents » est long, complexe et nécessite de la part des éducateurs, des soignants beaucoup de temps. Actuellement, il n’existe pas vraiment sur Périgueux et ses environs de parcours diagnostic répondant aux critères de qualité HAS*.
Les recommandations actuelles concernant les TSA (Troubles du Spectre de l’Autisme) sont pourtant de procéder à un diagnostic le plus tôt possible, dès 2 ou 3 ans, pour permettre un accueil et une prise en charge précoce et adaptée. Cette précocité dans le diagnostic et les soins permettent d’agir avec une plus grande efficacité en raison de la relative plasticité cérébrale à cet âge.
Le Ministère de l’Education Nationale a d’ailleurs prévu, et il faut en saisir l’opportunité, la création, dans le cadre du dernier Plan Autisme 2019-2022, de 180 UEMA**, 100 classes par an dans les écoles primaires (ULIS- Ecole***) et 200 classes par an dans le second degré (Ulis- Collège, Ulis-Lycée).
Les associations de parents d’enfants ayant un trouble du neurodéveloppement font un travail formidable pour aider ces enfants et leur famille, mais aussi pour alerter les pouvoirs publics. Je ne peux pas les citer toutes mais simplement mettre en avant, « Autisme France » pour les TSA, « Hypersuper » pour les enfants ayant une problématique d’attention et d’hyperactivité, « Dyspraxique, mais Fantastique » pour les enfants ayant un trouble des coordinations motrices, et enfin « Avenir Dysphasie » pour les enfants présentant un trouble du langage.
Pour en avoir discuté à de nombreuses reprises avec le Docteur Jean-Benoît Dauphin, Pédiatre et Directeur technique au CAMSP ****, ce sont, sur l’Agglomération du Grand Périgueux, cinq à six nouveaux enfants diagnostiqués tous les ans, situations qui posent des problèmes inextricables aux médecins, aux enseignants, aux familles pour leur trouver des solutions dignes et efficaces.
Pour cette tranche d’âge, en termes de structures d’accueil d’enfants ayant un TSA, la Dordogne est pourtant, de loin, la mieux dotée de Nouvelle Aquitaine avec deux classes maternelles spécialisées UEMA, une gérée par les Papillons Blancs à Bergerac depuis la rentrée 2015 et une ouverte à Trélissac depuis septembre 2019 et gérée par la Fondation de l’Isle (Nous rappelons qu’à cette époque, la proposition municipale d’un site sur le Gour de l’Arche n’avait pas été retenu par l’Inspectrice du secteur). Sept enfants maximums dans chaque classe représentent les trois niveaux d’âges… donc quatorze enfants accueillis au total, en Dordogne. Ces classes prennent en charge les enfants tant au niveau de la scolarité qu’au niveau des soins, déchargeant les familles sur le plan organisationnel de leurs nombreux rendez-vous, permettant souvent à l’enfant d’intégrer durant quelques heures quotidiennes une classe ordinaire au sein de l’Etablissement ou l’accompagnant sur son temps de présence à l’Ecole pour des soins de thérapeutes (orthophoniste, psychomotricienne, neuropsychologue…).
L’évolution de ses enfants, aux dires des professionnels qui s’en occupent, est extraordinaire en termes de progression, d’adaptation et d’intégration. A l’issue des trois ans de maternelle, beaucoup peuvent réintégrer un cursus plus « normal » car ils ont gagné en socialisation : soit un CP ordinaire, soit un CP Ulis-Ecole.
Force est de constater qu’il existe un manque dans le parcours d’orientation avec vingt-quatre Ulis-Ecole en Dordogne, dont six sur le territoire du Grand-Périgueux*****, pour seulement deux UEMA, structures pourtant indispensables pour pré sélectionner et préparer ces enfants déjà dépistés, ou avec une forte suspicion de troubles, avant leur passage au niveau supérieur. En fait, deux autres classes maternelles seraient absolument nécessaires et auraient leurs effectifs déjà quasi complets dès la première rentrée scolaire.
Pouvons-nous, Madame la Maire, mes Chers Collègues unir nos efforts et peser auprès de l’ARS******, de la Région, du Département, voire de l’Intercommunalité qui reste concernée même si cela n’est pas dans sa compétence, pour aider, d’une part à la mise en place d’un « parcours diagnostic trouble du neurodéveloppement » et d’autre part à la configuration et l'aménagement de locaux scolaires à intégrer dans nos programmes d'investissement et dans nos politiques d'accompagnement du handicap.
La commune de Périgueux et ses 30 000 habitants s’honoreraient, pour ces familles en réelle difficulté, de porter un tel projet, à l’occasion des deux dernières années de ce plan gouvernemental ambitieux, soit 2021 et 2022, particulièrement à l’heure où nous souhaitons renouveler la candidature de Périgueux au réseau des villes « amie des enfants » d’UNICEF France, comme cela se fait depuis 2011, dans une convention qui devait être tripartite avec l’Agglomération du fait de sa compétence « petite enfance » obtenue depuis janvier 2012. Je vous serais reconnaissant, Madame la Maire, d’accepter d’organiser une réunion de travail sur ce thème, présidée par Madame Marie-Claire Becret-Dallé, Adjointe à Education, réunissant La Fondation de l’Isle, le CRA ******* de Bergerac, le Docteur Jean-Benoît Dauphin, Madame Brigitte Pistolozzi, Conseillère Départementale en charge de ces dossiers, les associations de parents, certains des professionnels concernés et des élus du Conseil Municipal éventuellement intéressés.
Cette situation est douloureuse pour beaucoup de familles périgourdines et mérite, et je sais que vous y serez toutes et tous sensibles, notre attention la plus bienveillante et un effort assez pressent pour dégager les financements nécessaires à la mise en place de ce « parcours diagnostic » et à la réalisation d’une de ces classes sur le territoire de la commune et qui sait, à provoquer, par son exemplarité, l’intérêt chez nos voisins à des actions comparables ou complémentaires.
Je vous remercie pour votre écoute et également de m’avoir permis, à l’occasion du vote de cette délibération, d’exposer cette préoccupation tant éducative que médicale.
* HAS : Haute Autorité de Santé
** UEMA : Unité d’Enseignement Maternelle Autisme
*** Ulis-Ecole : Unité Localisée pour l’Inclusion Scolaire
**** CAMPS : Centre Action Médico-Sociale Précoce
***** 6 Ulis-Ecole : 3 à Périgueux (Toulon, André Davesne et 1 privée le Sacré-Cœur), 1 à Boulazac, 1 à Trélissac et 1 à Coulounieix-Chamiers
******ARS : Agence Régionale de Santé
*******CRA : Centre de Ressource de l’Autisme
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