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Vanités, en ce jour de célébration des morts

En ce 02 novembre, jour de célébration des morts, pour méditer sur le sacré, pas forcément religieux, mais plutôt celui de notre rapport personnel à la déchéance et la finitude, des perceptions souvent non évidentes et occultées particulièrement chez les plus jeunes d'entre-nous et en raison de nos modes de vies désormais très urbains, éclatés et en partie déshumanisés, je vous suggère qu'il ne vous reste plus que quatre jours pour aller visiter à la Fondation Cartier pour l'art contemporain à Paris (fin exposition ce 05 novembre), son exceptionnelle exposition (6 œuvres uniquement), celle de Ron Mueck "Vanitas Vanitatum". C'est l'occasion d'une interrogation intime, formulée ou non, sur la trace que nous laisserons après notre passage terrestre...


Les premiers mots de l’Ecclésiaste, dont les différents chapitres sont une paraphrase de cette idée : "Vanitas vanitatum", et "omnia vanitas", vanité des vanités, et tout est vanité.

« J’ai élevé des ouvrages magnifiques, j’ai bâti des maisons et j’ai planté des vignes. J’ai possédé des serviteurs et une nombreuse famille, et de grands troupeaux de bœufs et de brebis. J’ai entassé l’argent et l’or, le revenu des rois et des provinces ; j’ai eu des musiciens et des musiciennes... En tout cela je n’ai vu que vanité, affliction d’esprit ; rien de stable sous le soleil. »

Bossuet, Voltaire, Chateaubriand et d'autres écrivains ont largement repris ces thématiques.

« Que de gens, dans notre monde de petites vanités ridicules, nous rappellent ce ridicule aubergiste d’opéra qui se glorifie de ce que Louis XIV, le grand roi, a eu la bonté de lui adresser ces magnanimes paroles : Monsieur Sansonnet, vous avez là une drôle de perruque ! Pitié que tout cela ! "

Cette citation que nous pourrions aisément transposer à notre époque dans les relations que nous entretenons avec les grands, ou les moins grands, dans un révérencieux un peu ridicule, est celle de Jean-Baptiste-Joseph Champagnac, "littérateur". Enfin la réflexion, formulée par Friedrich Nietzsche:


« La vanité d’autrui n’offense notre goût que lorsqu’elle choque notre propre vanité »

Exposition Ron Mueck - "Vanitas Vanitatum" - Fondation Cartier pour les arts contemporains - Paris 2023.


"D'un blanc immaculé, les terribles crânes géants du maître de l’hyperréalisme" selon "Connaissance des Arts". "Dans ce chaos, le spectaculaire prend le pas sur le morbide, invitant au silence et à la méditation."


Ron Mueck, Mass (2017)


Les vanités sont des compositions, des natures mortes le plus souvent, qui évoquent allégoriquement la destinée de l’homme et notamment sa fin, figurée souvent par un crâne.

"Comment faire face au savoir que tous les instants de notre vie sont aussi, inéluctablement, des choses qui passent?"


Ron Mueck, La messe (2017)


Ron Mueck, En Garde (2023)


Ron Mueck conçoit alors des sculptures, qu'une cinquantaine au total dans toute sa production artistique, qui reproduisent fidèlement le corps humain dans ses plus minutieux détails, grâce au silicone, au plâtre dentaire, à la résine polyester et à la peinture à l’huile. Un goût du morbide transparaît, à travers la déchéance de ses corps obèses et vieillissants accentuée par leurs dimensions anormales. Les meurtrissures de l’âge sont écrasantes, les proportions épiques. Des peaux terriblement vivantes, flasques, malmenées, il y a un sentiment de paix dans leurs expressions, mais un air triste, pensif, interrogateur. Un sentiment de fin dans leurs attitudes. Il donne vie à des personnages qui évoquent la mort, la vieillesse et la mélancolie, comme cet homme nu dans un bateau pensif et désabusé.

Ron Mueck, Man in a Boat (2002)


L’apparence physique de ses personnages hyperréalistes ouvrent une porte sur l’intimité, celle de Ron Mueck, peut-être la nôtre. Un monde d’incrédulité alors que nous sommes confrontés à des portraits de l’humanité plus que réels. Très en phase avec la désespérance du monde.

Ses sculptures interrogent, dérangent, amusent. Ron Mueck ne travaille pas à l’échelle, jamais à grandeur nature parce que cela ne lui semble pas intéressant :

« Nous rencontrons des gens grandeur nature tous les jours ».

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