Conseil Municipal de Périgueux - 08 juin 2022
Délibération 7 « Compétence Tourisme »
Je parle, ici, au nom des deux groupes d’opposition, celui d’Antoine Audi et celui de Patrick Palem.
Madame la Maire, mes cher(s) collègues,
C’est avec une certaine légitimité que j’évoque ce sujet à l’heure où encore la semaine dernière, en tant qu’ancien président et « liquidateur » - c’est le terme - de l’association OTI avant sa transformation en EPIC : j’ai signé les derniers documents clôturant nos choix collectifs de 2017-18, actant le transfert de la compétence à l’EPCI du Grand Périgueux. Il nous aura fallu cinq ans pour mener à bien, du moins administrativement, cette dissolution !
Malgré toutes les mises en garde à votre endroit et les demandes réitérées de discuter pour rechercher un accord ou rapprocher les points de vue avec le Président de l’Agglomération, y compris ici, dans cette enceinte, nous allons devoir régler des problématiques de confrontation de personnes sur un sujet pourtant primordial et essentiel pour notre ville, celui du tourisme. D’autres litiges pourraient survenir sur de multiples compétences que la ville n’a plus en charge mais dont les champs d’actions communautaires risqueraient, eux aussi, de nous concerner au premier plan.
Nous nous posons trois questions :
1. Cette décision hâtive est-elle prise pour les bonnes raisons ?
2. Cette politique est-elle dans l’intérêt de notre ville, ou est-elle partisane ?
3. Auriez-vous fait cette démarche si vous n’aviez pas été évincée de la délégation ?
A vous relire, rien de tout cela n’était pourtant écrit dans votre Contrat d’Action Municipal rédigé en 2020. Mais, nous vous l’accordons, il est impossible que la ville-centre, maillon essentiel du développement touristique, soit mise à l’écart. Chaque élu de la ville porte la fierté que notre cité bimillénaire, soit le moteur attractif du projet touristique de ce territoire. Nous le devons à nos concitoyens et à nos visiteurs. Nous ne devons pas, sur ce sujet comme sur d’autres, gaspiller les deniers publics et la taxe de séjour ne doit pas financer des stratégies de pouvoir incompréhensibles.
Madame la Maire, à notre sens, nous ne pouvons dans l’urgence « déconstruire » l’OTI existant et bâtir sans risque un nouvel OT communal !
Nos collègues élu(e)s, ici présents, n’imaginent pas tous les problèmes que vous allez devoir résoudre dans cette opération, qui serait réellement une première en France…
Il semblerait utile, avant de rendre un avis, de conduire une étude d’impact de la défusion : Quel coût direct ?
Quel impact sur les ressources humaines ?
Sur la relation avec les prestataires touristiques du territoire ?
Sur le chiffre d’affaires de la structure existante ?
Nous avons listé au moins six difficultés :
1. Un engagement financier énorme pour la ville car l’agglomération n’a pas obligation de retourner les finances transférées d’où un coût multiplié par deux, in fine, pour nos habitants.
2. Un problème aberrant de doublon voire de triplon des services (les personnels, les locaux, les missions, la communication…) entre les trois organismes (OT communal, OTI et CDT), qui vont devoir co-exister, une nouvelle fois de manière absurde et illisible pour le touriste, à 500 mètres de distance les uns des autres…
3. Une vraie possibilité de perte de la labellisation « station de tourisme classée catégorie I » car la récupération de l’OT au niveau communal implique de fortes compétences des services pour respecter, à nouveau, impérativement, les 19 critères du label, notamment l’excellence, la pluri saisonnalité et la pérennité. Il faudrait donc, professionnaliser de nouvelles équipes, investir dans de nouvelles technologies obligatoires et accueillir les visiteurs en plusieurs langues… Le risque est une rétrogradation en catégorie II pour l’OTI et le retour de la compétence au sein de l’agglomération si la ville ne valide pas tous ces items.
4. Un risque de perte du « sur-classement démographique » avantageux (calcul réalisé en majorant le nombre réel d’habitant par un nombre moyen de touristes) des villes « stations touristiques de 1ère catégorie », à savoir pour nous, par exemple, la perte de la majoration des indemnités du maire et des adjoints [tiens, tiens…], la diminution du nombre de Directeurs des Services, la perte de certaines dotations bonifiées par l’afflux touristique, etc.
5. Une gestion humaine douloureuse car beaucoup des personnels passés au GP ont le sentiment d’avoir bien rempli leur mission et appréhendent de réintégrer les effectifs de la ville, préférant pour certains que nous avons rencontrés, changer de statut et travailler sous contrat de droit privé,
6. Un délai de mise en place trop long et des projets différés car ces dossiers vont mettre des années à se finaliser du fait de l’étude d’impact des deux directions générales, des nombreux votes successifs des deux collectivités, de l’évaluation par la CLECT (Commission Locale d’Evaluation des Charges Transférées), de la validation de la catégorie touristique par le préfet, de l’organisation effective, du recrutement de personnels…
Cette crise ne grandira ni les uns ni les autres et retardera assurément tous les projets. Saisissons-nous plutôt de cette occasion pour que, dans cette assemblée, se crée l’opportunité d’une vraie réflexion trans-partisane pérenne qui dépasse votre mandature, Madame la Maire et celle du Président Auzou.
Pourtant déjà tranchés à Périgueux, ces choix fondamentaux, par suite de la loi NOTRe, de l’identité communale propre ou de celui de la rationalisation de la compétence transférée à l’EPCI, ne peuvent être continuellement remis en cause à l’heure où notre territoire d’attractivité devrait être plutôt élargi à celui de toute la vallée de l’Isle, seule échelle pertinente, mais c’est mon avis personnel, de notre visibilité pour les touristes.
Nous devons placer les intérêts solidaires du territoire sur le seul terrain du tourisme au service des habitants et non sur le terrain politique. De plus, chacun le sait, le temps passé à la forme n’est pas consacré au fond.
A ce stade, Madame la Maire, nous ne participerons pas au vote de cette délibération, car nous pensons qu’il existe encore une marge de négociation et de réflexion et vous suggérons, dans le cadre de notre propos, de prendre l’initiative de retirer temporairement cette délibération. Nous vous remercions de votre écoute et espérons que vous serez en mesure, dans l’intérêt de tous, de renouer les fils du dialogue, ici et au-delà, pour porter une vision commune et une ambition forte pour notre ville, dans ce domaine essentiel qui touche à notre attractivité, prérogative dont vous avez toujours la délégation au sein du GP.